jp a écrit : ↑28 mars 2021, 07:47
Ah, tiens, on n'est pas d'accord, mais je vais sourcer ce que je dis : D'après Sébastien Fontaine (Selmer, concepteur de la basse privilège), la différence de longueur entre un corps du bas de clarinette basse sec (non joué) et joué régulièrement est d'environ 1 mm. Vérifié sur ma clar basse 25/II réglée par le même Sébastien Fontaine, pas jouée pendant 6 mois, puis qui au moment de sa vente avait les longues tringles qui coinçaient. Le bois sec se rétracte.
J'ai expérimenté des basses qui fendent : une basse quasi neuve (1 mois) qui joue toute la journée en stage et qui fend (au point d'en être injouable) le quatrième jour du stage. Difficile de ne pas relier la fente au fait que la basse était jouée 8 heures par jour. Pas de chocs ni thermiques ni mécaniques, mais une modification d'hygrométrie rapide.
J'en ai discuté récemment avec Arnaud Montois (transfuge de Buffet à Selmer depuis pas très longtemps), on sait que certains musiciens fendent des clarinettes (j'ai des noms!) et tous ceux que je connais sont passés à du green line. Ce ne sont pas les musiciens qui achètent des instruments qui ont été noyés sous les contraintes mécaniques. Il y a quelque chose chez eux qui fait qu'ils fendent (source Stéphane Gentil, relation artistes chez Selmer). Ils ne vivent pas plus que moi sous des projecteurs infrarouges.
Je suis persuadé que les contraintes thermiques peuvent faire fendre des instruments, ainsi des contraintes mécaniques et des chocs, c'est l'évidence, mais pour moi la source principale des fentes sur les instruments neufs est la variation rapide d'hygrométrie et la façon dont le bois absorbe l'eau. C'est d'ailleurs cohérent avec les recommandations des marques concernant le rodage des instruments.
jp
On n'est pas tellement en désaccord en fait, car je confirme tes observations et celles de tes sources. Je propose en revanche que les causes des fentes sont assez différentes, ainsi que les remèdes associés.
Le bois sec se rétracte avec l'hygrométrie ambiante qui diminue et se gonfle avec l'hygrométrie qui augmente.
Absolument vrai, et que tu joues ou pas l'instrument. Ceci dit: premiement, pour un bois aussi dense que la grenadille (contenant seulement 10% à 15% d'air) cela se fait très lentement. Ici, quand le degré d'hygrométrie ambient passe de 60% à 20%, une clarinette met des semaines à se rétracter. Et tu peux la jouer 1h à 2h par jour, elle va se rétracter pareil. Si tu veux stabiliser cela, tu mets un sachet (deux pour une basse) humidifiant (e.g. Boveda 58%) dans ta caisse et rien ne bouge. Deuxièmement, les contraintes qui dominent dans le bois sont celles dues à ce retrait et sont maximales pour une dessication maximale, c'est à dire que ces contraintes diminuent quand le bois gonfle à nouveau (le bois va donc avoir moins tendance à se fendre). Si tu veux te prémunir contre les fentes quand tu achètes un instrument neuf, tu le laisses deux mois dans un local à 20% d'hygrométrie et si il fend, c'est sous garantie et si il ne fend pas, il a peu de chances de fendre à l'avenir.
Pour la basse neuve qui fend au bout d'un mois, et donc avec un bois pas encore très stable, je pense que pendant ces 8 heures par jour, la basse est soumise à tout un tas de contraintes thermiques et mécaniques (incluant les vibrations) et il est difficile de pointer une composante unique. Si c'était seulement une modification d'hygrométrie rapide, en particulier vers le haut, toute basse qui soudainement est jouée beaucoup plus se comporterait ainsi, et il faudrait donc roder tout instrument en bois à chaque fois qu'on envisage de l'utiliser plus. Je pense que cela n'est pas le cas.
Certains clarinettistes fendent plus de clarinettes que d'autres:
- ils exhalent a priori le même air dans la clarinette (et ont a priori la même température corporelle)
- ils les empoignent différemment pour les monter et démonter, les jouent différemment mécaniquement, les trimballent et les stockent dans des boîtes différentes et dans des conditions différentes
Conclusion ?
- certains se précipitent sur l'idée que cela doit être leur salive (laquelle en plus de ne rien contenir qui puisse attaquer chimiquement le bois ne va pas dans l'instrument, c'est de la condensation qui se trouve dans la perce) qui est spéciale.
- je prétends que les clarinettistes qui fendent plus de clarinettes ne le font ni avec leur salive ni avec l'humidité. Bien sûr, cela reste à démontrer, et vu la rareté des instruments qui fendent et la durée du processus, concevoir le design expérimental pour cela n'est pas trivial.
Il est clair que les composites et autres matériaux de synthèse prendront le dessus à l'avenir. Le Green-Line est un premier pas, mais il est néanmoins plus cassant et plus lourd (30 g à 70 g sur une soprano Sib) que la grenadille, et sans compter que certains modèles Buffet, et pas des moindres, n'existent qu'en bois, c'est aller vite en besogne que taxer de snobisme ceux qui préfent encore le bois.
J'acquiesce que c'est bien de citer ses sources.
Je ne construis pas ni ne vends de clarinettes, mais possède quelques connaissances accumulées lors d'interactions avec mes collègues de recherche sur les propriétés du bois, la caractérisation moléculaire des gènes impliqués dans sa formation, ainsi que l'amélioration génétique des arbres relativement à la croissance, aux propriétés du bois et à d'autres caractéristiques (adaptation à la sécheresse et aux conditions climatiques, défense contre les paratites).
Pour prouver que je ne suis pas un troll, mes publications peuvent se trouver ici:
https://scholar.google.com/citations?hl ... 8seqYAAAAJ
(j'étudie les séquences d'ADN de toutes sortes de choses, pas seulement des arbres).
Finalement, une note pour rire un peu avec les corrélations qui n'impliquent pas la causalité:
https://www.tylervigen.com/spurious-correlations